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Biennale 2019

Reconversion/réhabilitation, le patrimoine industriel

L’architecture industrielle réinventée


La friche industrielle

Un patrimoine à reconquérir




Si l’engouement pour le patrimoine industriel se manifeste chaque année pendant les journées du patrimoine avec de nombreux visiteurs impatients de découvrir ou de redécouvrir ces lieux interdits au public, cet enthousiasme n’est pas partagé par tout le monde. Les promoteurs immobiliers soutenus par les élus locaux voient dans la démolition de ces sites aux usines rouillées, l’aubaine d’édifier un centre commercial, un parking, ou encore une unité d’habitation beaucoup plus rentable que ce no man’s land aux activités défuntes. Pour certains, il est salutaire de gommer cette conjoncture industrielle et technique révolue. Celle-ci affecte l’image de marque d’un quartier, dévalorise les habitations environnantes. L’idée d’effacement pour insuffler une nouvelle dynamique et rendre vivant un lieu moribond est une idéologie tout à fait louable, mais l’éradication d’un passé industriel glorieux efface les mémoires. Il est effectivement plus facile de protéger une église, un château que de sauver et d’envisager la réhabilitation d’un site industriel en perdition. Les halles de Paris comme celles de Baltard ont été démembrées sans que la population ne se mobilise ou s’émeuve de leur disparition. Après la révolution française de nombreux édifices ont été réduits à un tas de pierre, car ils avaient perdu leur fonction. Pour qu’un bâtiment puisse subsister, il fallait lui donner un rôle dans cette nouvelle société. Le célèbre Lycée Henri IV (Paris 4ème) a connu cette mutation. Tout d’abord, le site de l’actuel établissement fut construit en 1744 sous Louis XV, l’abbaye Sainte Geneviève fut déclarée bien national en 1790 après avoir chassé les chanoines sous la révolution. Établissement d’enseignement en 1795, école du Panthéon puis lycée Napoléon, il fut le premier lycée de la république. L’église abbatiale sera néanmoins détruite entre 1801 et 1807. Lors de sa restauration le lycée rebaptisé collège royal Henri IV accueillera les fils de Louis Philippe et la haute aristocratie. Suite à la succession de différents régimes politiques, il changea plusieurs fois d’appellations. En 1893 il sera nommé lycée Henri IV à titre définitif. Que serait devenu ce site aujourd’hui, s’il n’avait pas été réinvesti par l’homme ?


Quel avenir pour les sites industriels en friche aujourd’hui ?

La conservation des sites industriels pose question. Ce patrimoine encore fraîchement bâti n’est pas encore « digéré » historiquement, il est donc difficile d’opérer un choix de valeurs anthropologiques, techniques et sociales. Ces sites sont pourtant la référence de techniques spécifiques, d’un produit ou d’un savoir-faire rattaché à une période historique marquée. Ces dynasties industrielles ont connu une naissance, un apogée et une chute, mais il ne faut pas négliger l’aspect humain. Ces usines employaient un grand nombre d’hommes et de femmes et étaient la scène des luttes syndicales (obtention des congés payés, réduction du temps de travail, amélioration salariale). Mon grand-père, Marcel Pierpont, rembobineur de moteur à Tourcoing dans le nord de la France a combattu aux côtés de ses collègues pour l’évolution des conditions de travail et la reconnaissance d’un statut pour les ouvriers. Mis au piquet comme « agitateur » par plusieurs grands patrons, il fut forcé de quitter les usines de textile pour créer son propre atelier. Saluant son savoir-faire, les entrepreneurs faisaient toujours appel à lui, mais avec l’assurance qu’il se tienne à l’écart de toutes manifestations politiques. Les grands ensembles aux briques rouges avec leurs cheminées sont des souvenirs de mon enfance. Mes grands-parents ont vécu dans ces cités ouvrières, où toujours construites à proximité des usines, ces maisons s’alignaient sur des rues entières. Identiques et en miroir, ces habitations en briques rouges abritaient les familles d’ouvriers ; s’organisait à la sortie du travail la vie sociale, l’entraide. Ceux qui pensent avoir échappé à la standardisation urbaine avec leurs cités pavillonnaires dortoirs se leurrent, ils ont juste gagné un peu plus de confort matériel et un individualisme prononcé, loin de l’entente fraternelle entre les ouvriers qu’ont connue mes grands-parents.


Des lieux d’exception, un patrimoine témoin d’inventions architecturales et de progrès social

L’industrialisation de certaines régions a provoqué une forte augmentation démographique et des difficultés pour les familles d’ouvriers d'obtenir un logement décent. Le familistère fut construit en suivant les principes du dogme de l’industriel Jean-Baptiste-André Godin (fabricant d’appareils de chauffage et de cuisson haut de gamme). Se souvenant de l’insalubrité des logements réservés aux ouvriers, il décide de partager sa fortune et de réaliser un ensemble architectural « le palais social » pour le bien-être de ses salariés, travaux réalisés de 1858 jusqu’en 1883. Cet ensemble constitué de trois unités d’habitation juxtaposées en forme de U, accueille sur quatre niveaux des appartements individuels qui donnent sur une cour intérieure protégée par une toiture en verre. Cet habitat collectif offrait aux ouvriers des services : une crèche, une école, un magasin à prix coutant appelé « l’économat », une laverie, un théâtre, des douches, une piscine dans un cadre de verdure avec son jardin et ses champs, le tout accessible à chacun gratuitement. Outre les services, le bâti offrait de larges fenêtres, pour faire circuler l’air et la lumière et des blocs sanitaires avec l’eau courante pour la vaisselle et la toilette à chaque étage. Le familistère était en avance sur son époque car si le mouvement hygiéniste s’intensifie au début du XXème siècle, on trouvait encore des logements dans les années cinquante sans eau courante. Le site d’habitation est classé aujourd’hui monument historique depuis le 4 juillet 1991.

Ces architectures industrielles sont innovantes en prouesses techniques. On peut citer la soufflerie de l’ONERA (Office national d’études et de recherches aérospatiales) à Chalais-Meudon dans les Hauts-de-Seine. Construite entièrement en béton armé entre 1932 et 1934, cette soufflerie a été réalisée par l’ingénieur en chef de l’aéronautique, assisté du maître d’œuvre Gaston Le Marec, selon une architecture aux formes arrondies et d’une solidité à toutes épreuves. Ce « temple du vent » permettait de tester la résistance du matériel aéronautique pour des avions d’une envergure de douze mètres de long. Ses activités furent stoppées en 1976, ne répondant plus au standard des avions d’aujourd’hui. Il fut classé monument historique en 2000.

L’entreprise chocolatière Menier est un joyau de l’architecture industrielle, premier bâtiment industriel classé monument historique en 1992. Jean-Antoine Brutus Menier investit le vieux moulin à eau datant du XIIème siècle à Noisiel en Seine et Marne, en 1825. Le chocolat est alors une denrée rare qui enrobe les médicaments. En 1836, l’invention de la plaquette de chocolat augmente considérablement la production. En 1869, l’architecte Jules Saulnier secondé par l’ingénieur Armand Moisant remplace les roues en bois par des turbines et prend le parti pris de dévoiler la structure en métal sur toutes les façades. La brique devient un habillage, celles-ci forment des motifs géométriques agrémentés de céramiques luxueuses, matériau coûteux et innovant pour l’époque. Le site est sauvé avec l’insistance de la commune et de la direction du patrimoine du ministère de la culture, il deviendra le siège social des usines Nestlé en 1996. Les bâtiments seront réhabilités par le cabinet d’architecture Reichen et Robert.


Un nouveau rôle pour l’architecte

Si on a pu remarquer la collaboration entre architecte et ingénieur dans l’élaboration d’édifices strictement fonctionnel voués à l’industrie. Aujourd’hui, la profession d’architecte invite celui-ci à devoir construire en tenant compte du bâti existant, construire à partir du construit et même sur du construit. Jean Nouvel avec la reconstruction de l’opéra de Lyon entre 1989 et 1993 conserva les fondations datant de la moitié du XVIIIème siècle. Celui-ci érigea une voûte en verre au sommet du bâtiment et proposa un projet établissant un dialogue entre modernité et histoire. La réalisation heurta les Lyonnais pendant quelque temps, mais aujourd’hui on salue son audace et n’est-ce pas là une réussite architecturale entre ancien et contemporanéité.


Hélène Horrent Hélène Horrent
Professeure relais à la Biennale 2019

helene.horrent@ac-lyon.fr



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